A une heure et quart juste apres le dejeuner, C2 et moi sommes sous la pluie sur le quai, en attendant le depart de notre excursion de l'apres-midi. Au programme : viree en helicoptere, qui nous emmene sur un glacier ou nous ferons du "chiens de traineaux", et retour en helicoptere. Plutot cool hein ? Le seul probleme c'est la pluie et le froid, mais nous nous etions prepares en emportant gros anoraks et gants dans nos valises. Le prospectus decrivant toutes les excursions est tres clair : "All tours operate rain or shine" (toutes les excursions ont lieu, qu'il pleuve ou qu'il fasse soleil).
Eh bien, c'est faux. C'est un mensonge. Bouh ! Honte sur vous, Gentils Organisateurs ! La mention devrait etre "All tours operate rain or shine, but not fog". La petite nana en charge d'organiser le depart de notre tour nous debite un baratin qu'elle a deja du donner une bonne dizaine de fois "malheureusement la meteo est trop mauvaise pour aller en haut du glacier, donc soit vous vous faites rembourser, soit vous pouvez prendre un autre tour qui ne fait qu'aller sur le glacier, moins haut, pas de chiens de traineaux, et vous serez rembourses de la difference de prix". En fait, on devrait demander un dedommagement pour l'intense detresse causee par ce changement dans le planning. Vous imaginez ca, me changer mon planning a moi, ZPP el Planifikator ?
Les larmes coulent sur nos joues (a moins que ca ne soit la pluie) pendant que nous conciliabulons pour decider de la suite de l'apres-midi avec C2. Et puis allez ok, on n'est pas venus jusqu'ici pour rester sur le bateau... ok pour "l'excursion au rabais". On passe de "Dog sledding on the Mendenhall Glacier" a "Mendenhall Glacier Helicopter Tour". Snif. Ah, je retrouve le sourire en pensant que je pourrai aller jouer la difference de prix au casino !
Nous attendons a l'abri de la pluie. Un minibus finit par arriver, et nous emmene avec un petit groupe d'autres "dégradés" a Juneau International Airport, dans la batisse de Temsco Helicopters. Nous y sommes soumis au visionnage d'une video sur la securite dans l'helicoptere, et munis d'un gilet de sauvetage et de "glacier boots". Tres drole ca les glacier boots. Ce sont des especes de grosses chaussures qui s'enfilent par dessus les chaussures que nous portons deja, avec des crampons sous les semelles, et qui nous font tous ressembler a Big Foot, coinces dans nos boots et nos anoraks hermetiquement fermes jusque sous le menton. Il a l'air de faire froid la-haut ! Note : glacier s'ecrit pareil en francais et en anglais, mais nos amis americains prononcent "glè-cheurre".
30°F = -1°C, fairly windy = vent assez fort
Le petit tableau bleu-jaune-rouge en haut a droite de la photo est tres encourageant : il indique la temperature "ressentie" pour differentes vitesses du vent, selon la temperature de l'air. La zone bleue du tableau correspond a "little danger of frostbite" (gelure), la zone jaune a "increased danger" et la zone rouge a "great danger" (avec des gelures possibles en quelques minutes). Pas d'inquietude, nous sommes encore dans la zone bleue aujourd'hui, mais on ne va pas se promener la-haut en jaquette de bain.
Nous sortons attendre dehors, pour nous habituer au froid et a la pluie sans doute. Apres quelques minutes la flotille d'helicopteres fait son apparition dans le ciel, telle une chevauchee des Walkyries des temps modernes. C'est de l'industrie a la chaine ce machin. Les cinq helicopteres se vident de leurs passagers, et nous nous precipitons a bord.
embarquement immediat
Comme d'habitude (vous vous souvenez, se vanter = to brag ?) nous avons les meilleurs places avec C2 : les deux sieges devant a cote du pilote. Bien, tres bien.
copilotes a bord
En avant ! Le mauvais temps, la pluie, la brume, et la buee n'autorisent pas de photos de grande qualite...
l'aeroport de Juneau
ah, enfin un glacier !
ca aurait ete bien qu'il fasse beau...
mais non, il fait moche. Bon, ils voient pas dans le brouillard les chiens de traineaux ? Snif
et c'est tout cracra en fait un glacier, vu de pres
Le pilote nous a sans doute sorti un petit baratin pendant le vol, mais je n'ai rien retenu. A droite un glacier... a gauche un glacier... Le vol depuis l'aeroport n'est pas long du tout, une quinzaine de minutes environ. J'ai a peu pres situe notre lieu d'atterrissage (aglacissage ?) sur la carte. Les cinq helicopteres expulsent tous leurs passagers et rembarquent les pauvres touristes frigorifies de la precedente rotation. Puis ils repartent, nous abandonnant dans ce monde glacé. Nous sommes pris en charge par quelques 'guides', qui ressemblent plus a des etudiants venus gagner leur pain au frais pendant les deux mois d'ete qu'a des specialistes de la haute montagne.
Malgre un debit de blagues assez soutenu, j'ai reussi a suivre les explications de notre guide. Bon d'accord j'aurais sans doute pu en apprendre autant en allant tout simplement a la Mer de Glace dans les Alpes en France. Mais j'ai prefere traverser un ocean et un continent pour decouvrir le monde des glaciers, c'est plus classe a raconter dans les soirees de l'ambassadeur. Premier choc pour le petit gars naif de la plaine que je suis : un glacier, ca avance ! Pas tres vite, certes, mais ca s'ecoule comme une grosse riviere de glace. C'est difficile d'imaginer une chose qui parait aussi rigide et figé pouvoir avancer, mais c'est bien le cas - une centaine de metres par an pour le Mendenhall Glacier. C'est ainsi que les glaciers creusent les vallees "glacieres", a la forme caracteristique en U opposee a la forme en V des vallees creusees par un cours d'eau 'liquide'.
Deuxieme source d'etonnement : si cette glace s'ecoule, elle a besoin d'une 'source'. D'ou vient la glace ? D'orages de grele en altitude ? Non... il s'agit de neige, qui chaque hiver tombe par metres (plus de 100 pieds par hiver - 30 metres - au Juneau Icefield, la source du Mendenhall Glacier), se tasse de plus en plus sous les couches successives des chutes repetitives, jusqu'a devenir une nouvelle couche de glace au sommet du glacier. Et voila ! Ce qui me semble apres coup tout a fait logique, car je l'observe chaque hiver sur notre driveway : si on ne pellete pas et qu'on ne sale pas abondemment juste apres ou pendant une chute de neige, bonjour la patinoire le lendemain. D'accord pas avec une epaisseur de plusieurs dizaines de metres comme au Mendenhall Glacier, mais juste un ou deux millimetres bien ennuyeux pour se garer. Cela me donne envie de faire une experience hautement scientifique : si je ne m'occupe pas du driveway l'hiver prochain, aurai-je le temps de voir se former un mini-glacier, et surtout, de le voir avancer ? Palpitante expectative. Ne manque plus que d'acheter des pneus clous pour nos voitures.
Bon, je me suis legerement egare dans ma digression. Reprenons ou nous en etions.
sur le glacier
attention aux crevasses !
une riviere sur un glacier... ca doit etre de l'eau pure n'est-ce pas ?
mais oui, testee et approuvee par ZPP !
En plus du blanc, un glacier melange deux autres couleurs : le bleu de la glace quand elle est tres compacte dans ses couches profondes, et le gris de toute la caillasse et terre que le glacier racle au fond et sur les bords et transporte avec lui en descendant la vallee.
Voici une tentative de panoramique.
Apres trois quarts d'heure sur le glacier, nous commencons a etre bien refroidis. Les gelures sont encore loin, mais nous sommes bien contents quand les helicopteres font un retour victorieux dans un vacarme digne d'Apocalypse Now. Apres une derniere blague, nos guides nous ré-entassent dans les helicopteres, et nous voila en route pour l'aeroport de Juneau.
beuh, on rentre deja
Le vol retour est tres court, c'est termine la viree pour touristes avec des detours pour admirer les coins fameux. En moins de dix minutes c'est torché, et nous retrouvons les locaux de Temsco Helicopters, Inc. Nous rendons nos bottes de glacier et gilet de sauvetage, un petit coup de minibus, et nous voila sur le quai du Diamond Princess, sous la flotte, avec l'impression... de nous etre faits avoir.
Et oui, il est l'heure que je fasse mon francais ! Que je ralouille un petit coup ! Ok, je ne regrette pas d'etre alle voir un glacier de pres. Il n'y en a pas beaucoup a Waltham, et c'est impressionnant. Mais alors les tarifs de Temsco, ca n'est pas dans la categorie 'impressionnant', plus dans la categorie 'risque de crise cardiaque'. L'excursion "chiens de traineaux" avait un prix que je n'ose meme pas mentionner ici. Mais au moins on pouvait se dire "on va musher du dog, c'est once-in-a-lifetime, bla bla bla", ok. Notre excursion au rabais sur le glacier, elle, a $150 de moins que le dog mushing, se retrouve avec un prix defiant le raisonnable, et un contenu somme toute assez creux : 25 minutes d'helicoptere & 45 minutes de pitrerie sur le glacier. Mmm... c'etait du vol ! Pour comparaison, a Hawaii on avait vole plus de deux fois plus longtemps, et ca avait coute deux fois moins cher. Enfumage puissance quatre ! Seule consolation : je ne suis pas encore assez gros pour devoir payer la surcharge en cas de poids superieur a 250 pounds (113 kg). Tachons de clore ce paragraphe penible : je ne suis pas sur de recommander cette excursion, malgre la tentative desesperee de Temsco de justifier leurs tarifs exhorbitants sur leur site. Grumpf !